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Le Troll Enez 2015

Nos retrouvailles avec Guy après le MDS et surtout les débuts des Renards du Désert.

 

Le Troll Enez 2015

 

 

 

Lorsque, fin 2014, Jack me parle du Troll Enez Morbihan, très peu de monde en France, voire dans le Monde, ne sait ce qu’est un swimrun. Le sport lui-même n’a que 8 ans, il est encore confidentiel et ne sort que peu de la Scandinavie. Pour ma part, j’en ai entendu parler au mois de mai 2014 par Patrick, un copain nageur-traileur. À mon idée, ça fait partie de ces épreuves un peu folles qui me tentent, un ovni, un truc qui ne ressemble pas à ce que tout le monde connaît. Je le classe pour moi dans le style de L’Inferno (triathlon entrecoupé de VTT), de la Vasaloppet, de la Pierra Menta. Je n’y vois pas un « vrai » sport. Le faire c’est sortir du cadre très normé, formaté du triathlon, c’est faire « autre chose ».

 

Mais si une épreuve se développe en France c’est qu’il y a un potentiel. Je sens que ça frémit, qu’un sport est en train de naître et va sans doute bientôt exploser. Je me dis qu’en vue de participer à L’Ötillö un jour, le Troll Enez serait une bonne prépa, un moyen de découvrir l’activité, de commencer à s’aguerrir.

 

La course fait 43 kilomètres dont 7 de natation. On va passer d’île en île avant de rejoindre la côte. Plusieurs portions dont une de 14 kilomètres à pied et une de 1500 mètres en natation. On nous promet des courants, de la marée et des vagues. Ça ne m’affole pas, j’ai connu la région dans une autre vie, 20 ans auparavant.

 

Je prends date, puisque Jack me le demande, et je cogite à mon futur binôme. Je contacte Guy qui se marre quand je lui annonce le projet mais qui le valide. C’est lancé ! Patrick, plus nageur que traileur s’engage avec Greg plus traileur que nageur. Jack « embauche » la petite Véro, qui a un niveau supérieur au sien (« je lui ai dit qu’elle allait faire de l’humanitaire » rigole-t-il). Nous serons donc 6 à tenter l’aventure.

 

Guy monte en voiture. Nous le rejoignons d’un coup d’avion. Nous en profitons pour faire un peu de visite. Nantes, Quiberon, Carnac, Vannes. Que la Bretagne est belle en ce début d’octobre !

 

Sur le papier Guy et moi ne sommes ni les plus rapides à pied, ni les plus rapides dans l'eau. Mais nous sommes le binôme le plus homogène. Est-ce que ça suffira pour passer les barrières horaires et franchir la ligne d’arrivée de cette aventure inhabituelle ?

 

Pour le matériel nous avons tous les deux fait le choix d’une combinaison longue, pour nous protéger du froid. Si Guy a choisi d’acheter une combinaison de nage de base, pour ma part, j’ai investi dans le top de chez Head, la Swimrun Race. Ce sport me tente vraiment et je me dis que c’est un achat que je vais rentabiliser.

 

Nous avons bricolé un pull buoy sur lequel nous avons fixé un élastique qui nous permet de l’accrocher à la cuisse. Pour courir, une tri fonction, une paire de chaussettes basiques et ma paire de Hoka qui vient de boucler l’UTMB.

 

Un deuxième bonnet sous celui de l’organisation pour avoir moins froid à la tête, une paire de lunettes claires autour du cou, pour la natation. Nous faisons le choix des plaquettes. Mais prudemment nous les prenons petites, loin des standards des autres concurrents.

J’ai bricolé une longe avec un élastique acheté en magasin de bricolage. Nous la fixons, à l’aide de mousquetons, sur des ceintures à poche dans lesquelles nous avons mis des gels, pour le cas où. Et nous voilà équipés.

 

Il fait nuit noire lorsque nous montons dans le ferry qui va nous amener de Vannes sur l’île d’où sera donné le départ. Et en plus il pleut ! C’est vivifiant comme ils disent. Non, en fait ça meule ! Nous accostons sur le quai qui va servir de ligne de départ. Autour de nous, une immense majorité de triathlètes. Quelques coureurs, quelques nageurs. Je passe sur les bricolages des uns des autres, les bouées saugrenues, les montages alambiqués. On sent que ce sport en est à ses premiers balbutiements et que tout est à inventer. Ça me fait penser à ces images du triathlon dans les années 80, quand tout était bidouillé, très hétérogène, quand la débrouille avait encore lieu de cité.

 

J'avoue qu'au départ, une légère appréhension m'étreint. Dans quoi nous lançons-nous ? Que va donner cette compet ?

 

C’est au son d’une corne de brume que la course débute alors qu'il fait encore nuit. Quelques kilomètres de course à pied en guise d'apéritif. Puis vient la première session de natation. Nous avons un léger avantage, nous connaissons les enchaînements, nous les avons préparés. Je me lance, Guy dans mes pieds. Il y a pas mal de courant. Je ne m’affole pas, ça je connais ! Je m'adapte et sors sans avoir trop dévié. Seule ombre au tableau, Guy est à la traîne. Deuxième course à pied puis deuxième natation même topo. À la sortie de l’eau, Guy est loin derrière. On repart et là il m'explique qu'il a juste un problème avec ses lunettes, qu’il n'y voit rien. Ouf ! Je suis rassuré. On va vite régler ce problème et on pourra rester ensemble.

 

Rapidement, nous trouvons notre rythme. Les portions sur terre et en mer s’enchaînent sans anicroche particulière. La météo n’est pas très clémente mais nous sommes en Bretagne, donc nous nous faisons une raison. Nous gardons un rythme régulier et restons toujours plus ou moins avec les mêmes binômes. Nous sommes loin de la tête comme d’habitude diront les mauvaises langues, mais nous ne sommes pas pour autant dans les profondeurs du classement.

 

Sur la plus longue portion à pied, 14 kms, Guy choisit d'enlever la combinaison et de la porter sur son dos dans un petit sac qu'il a pris avec lui. Il est satisfait du résultat. Je reste dubitatif. Moi, je choisis de la garder et je ne vais pas le regretter. Elle ne m’a pas gêné et je vois que j’ai été imité en cela par tous les autres concurrents. Pour moi c’est une perte de temps mais ça satisfait Guy. Donc, ça me satisfait.

 

Le passage sur la côte se fait avec des sauts de puce sur des îles minuscules entrecoupées de longues portions de natation, agrémentées d’un fort courant. Le rendement à pied sur les galets et falaises de granit n’est pas bon mais nous sommes tous logés à la même enseigne. En revanche, notre choix de combinaisons intégrales était le bon. Qu’est-ce que les gars se gèlent autour de nous. Certains seront même contraints à l’abandon.

 

Notre crainte était de ne pas arriver à temps aux barrières horaires, dont l’une empêche de pouvoir faire la totalité du parcours. C’est un stress jusqu’à ce que nous y arrivions, d’autant que nous n’avons aucun repère sur les temps que nous allons mettre sur cette alternance nage-course. Finalement, nous passons les cuts avec une avance confortable. Nous sommes sereins à ce niveau et nous pouvons alors nous concentrer sur la gestion de course.

 

Quant à notre crainte de passer de la chaleur de la course à pied au froid de la natation, nous nous rendons compte que si ce choc est bel et bien réel, il n'en est pas moins facile à gérer. Et la course à pied, même sous la pluie et dans le vent, nous permet de nous réchauffer.

 

Puis viennent les dernières portions, les plus difficiles pour le moral. L'avant-dernière portion de course à pied est très longue et démoralisante puisque nous longeons un côté du port de Vannes, avant de repartir sur le quai opposé. Elle est très longue, pas forcément très belle. On passe dans des zones de travaux, on longe des rues embouteillées. Elle se fait au mental.

 

La dernière portion de natation est terrible, dans une eau particulièrement froide, d'autant plus que nos organismes sont fatigués. En plus le courant est costaud et il faut lutter contre.

 

Puis, enfin, la dernière partie à pied : 3 petits kms où nous allons nous battre encore, pour gagner une petite place au classement. Dérisoire certes mais symptomatique de notre état d’esprit où nous cherchons à nous surpasser. Nous finissons en 6h12’08’’. Nous sommes 44èmes, bien loin de la tête de course mais là n'est pas la question. Le contrat est rempli. La greffe a pris. Le virus du swimrun est entré en nous.

 

Greg et Patrick finissent peu de temps derrière nous. Sur le papier ils sont chacun meilleurs que nous dans leur discipline de prédilection, sauf qu’il faut toujours juger une chaîne sur le plus faible de ses maillons. Un bon nageur et un nageur moyen, un bon coureur et un coureur moyen, ça fait au final un binôme moyen, en tout cas c’est moins efficient que nous. Quant à Véro et Jack, ils n’ont pu passer un cut off et n’ont pas fini la course, tout en ayant bien apprécié l’expérience.

 

Au-delà, nous constatons le réel engouement pour cette nouvelle discipline. Autour de nous des sourires ravis, l'envie de recommencer, la joie d'avoir participé à quelque chose de nouveau.

 

Pour nous, c'est aussi un constat : nous fonctionnons bien en binôme, l'expérience nous a plu. Nous en sommes sûrs, d'autres projets verront le jour.

 

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